Désir d'histoires
Et voici le « désir d’histoires no 64″ dont voici la liste des mots (26 au total) : diplomatie – église – inspirante – croquis – vocation – escarpin – impureté – altitude – destination – esperluette – solitude – anaphore(*) – parcimonie – inquiétude – identité – faux (outil) – surprise – tour – papier – porte – assassin – vacances – jalousie – ensoleillé – victoire – pyramide.
(*) Vous noterez que le mot « anaphore » a déserté le texte…
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Avertissement : Ce récit est une pure fiction. Par conséquent, toute ressemblance avec des situations réelles ou avec des personnes existantes ou ayant existé ne saurait être que fortuite.
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Les épisodes précédents :
- Encore un peu de temps en liberté… (Désir d’Histoires no 60) : à l’instant présent, réveil d’un personnage « coincé » sur une île et coincé dans ses souvenirs.
- « Baisse la tête, je vais… » (Les Plumes de l’Année en lettre P) : dans un passé à peine passé (du moins semble t-il…), ce même personnage se retrouve en train de courir, pourchassé mais guidé, il fonce … tête baissée.. gare …
- Mis entre parenthèses (Désir d’Histoires no 61) : Suite à son rêve teinté de réalité, le héros revient à lui, toujours « coincé » sur son île. Inquiet, il décide d’explorer les environs et fait une troublante découverte.
- Brûler les traces (Désir d’Histoires no 62) : Retour vers le passé pour partager le début de ce qui s’annonce être une traversée d’est en ouest de la France. Mais avant tout, il s’agit de faire un peu le ménage
- Prisonnier des eaux (Désir d’Histoires no 63) : Enquête sur l’origine des empreintes découvertes sur l’île dans un décor qui tourne au cauchemar climatique, Nathan obtient la confirmation de cette présence et recouvre peu à peu la mémoire
La mémoire du héros se rapproche de plus en plus de son identité et de son parcours . Poursuite de la visite de ce passé…
« Du côté de la Bergamote,
PMU
& TABAC
& PRESSE
& Repas à toute heure »
Agréable surprise, l’endroit se révèle être charmant. La devanture parée de trop nombreuses esperluettes m’a fait craindre dans un premier temps un endroit bondé, bruyant et enfumé. Mais non, la place est presque déserte. Au loin, la cloche de l’église martèle l’heure avancée de cette fin de journée ensoleillée. Une télé bourdonnante diffuse en boucle les résultats des courses hippiques de l’après-midi.
Après avoir passé ma commande et procéder à une petite toilette, je m’installe, propre et rafraîchi, à une table. À quelques pas, un groupe de quatre personnes dissertent autour d’un papier sur lequel ils sont penchés. Celui qui mène la discussion s’interrompt, me dévisage, détaille mes vêtements un peu trop grands. Il semble s’assurer que je ne peux entendre distinctement son propos puis reprend son explication autour d’un croquis qu’il griffonne nerveusement. Leur excitation est palpable, chacun à leur tour, ses compagnons acquiescent. Ils lèvent de temps en temps la tête en direction du téléviseur et réagissent à chaque annonce de résultat. L’un d’entre eux se lève et lance un « youhouuu » tout en exécutant une grotesque danse de la Victoire sous les yeux de ses acolytes empreints de jalousie. C’est à ce moment-là que je prends conscience de la présence d’une femme me dévisageant discrètement depuis le fond de la salle. Élégamment vêtue d’un tailleur chic et de fins escarpins noir nacré, son visage n’exprime que la solitude de l’instant. Elle remet ses lunettes noires et détourne son visage. Sa silhouette très inspirante et l’ambiance feutrée du lieu gomment un peu mon inquiétude… et pourtant…
La porte d’entrée s’ouvre. Mon assassin protecteur me localise et se dirige sans la moindre attention pour le reste de la pièce. Sans aucune forme de diplomatie et sans prendre la peine de s’asseoir, il balaye du revers de sa main gantée la petite pyramide de morceaux de sucre que je venais de former. Il jette alors sur la table une montre au cadran brisé marqué du label SportGPS et dit dans un murmure menaçant :
« Les vacances sont terminées. Un des deux zigues que j’ai mis au four avait ce truc activé au poignet. Ils sont sur nos traces. On y va, il te faut arriver à destination avant demain matin !». Il s’exprime avec parcimonie et froideur. Je sens bien que ce n’est pas sa vocation que de faire la nounou. Mal à l’aise en pleine lumière, il ne me présente que son profil, col de l’imper remonté de l’imper sur son cou. Jusqu’à maintenant, sans réelle identité, il n’est pour moi que le spectre lugubre de la Mort, armée de sa faux à poudre et à balles. Haussement d’épaules de résignation, il m’indique l’extérieur tout en se dirigeant vers la tenancière. Il se saisit du petit carton déposé à notre attention et laisse glisser un billet sur le comptoir. J’emboîte le pas et ne peut m’empêcher de jeter un regard vers la mystérieuse femme. Incroyable, sans que je m’en sois rendu compte, elle a disparu… !
Installés dans une nouvelle voiture plus discrète et plus confortable, il a opté pour la direction des Vosges, improbable nouveau tracé de notre parcours. Dans la soirée naissante parée d’un ciel désormais lavé de toutes impuretés, cette prise d’altitude devrait nous permettre de brouiller notre piste. Imperturbable, depuis notre départ précipité, mon compagnon ne cesse de scruter le rétroviseur. Doucement, je me tourne… Nouvelle montée d’adrénaline : dans le véhicule qui nous succède, il me semble reconnaître une silhouette féminine devenue familière…
Coincoins traqués
Ici, la suite … Double dose
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